​Le Sénégal de Macky Sall, un Régime sourd muet entre Libéralisme et Socialisme

Le Sénégal, pays de la « terranga » situé à l’extrême ouest du continent africain, est l’un des pays du continent à avoir obtenu son indépendance depuis les années 60. 

Depuis plus d’un demi-siècle, le système politique du pays a connu de nombreuses mutations occasionnées par les différents régimes politiques qui s’y sont succédé. Ces mutations ont connu les premières lueurs de leurs balbutiements quand Léopold Sédar Senghor, en 1948, remettait en cause la Section Française de l’Internationale ouvrière (SFIO) comme moyen de lutte pour aider les peuples.

Ainsi le 27 septembre 1948 après avoir remis sa lettre de démission à Guy Mollet, Senghor créa à la même année le Bloc Démocratique Sénégalais (BDS). Ce fut le premier acte de naissance du système politique moderne sénégalais. Depuis, plusieurs évènements se sont passés au Sénégal.

Mais avec la victoire de Léopold Sédar Senghor en 1951 sur la SFIO de Lamine Gueye, les socialistes ont géré le pays jusqu’en 2000. Durant tout leur magistère il y eut beaucoup de scandales financiers. Beaucoup de dirigeants ou de chefs d’entreprise étaient frappés de malversations, de tripotages et de magouilles. Mais c’était sans compter sur une justice qui semblerait trop dépendante du pouvoir. 

Malgré le mécontentement de la population, il paraissait impossible de pouvoir gagner les socialistes lors d’une élection présidentielle. Ils l’avaient toujours remporté. Certains, comme Abdou Latif Coulibaly, avaient exprimé leur pessimisme quant à la possibilité d’une alternance au Sénégal en disant ceci: « Rien ne laisse entrevoir dans le court terme un départ des socialistes au Pouvoir. »

Mais les évènements lui donnent tort quelques mois plus tard. En effet, le scrutin de ballotage qui a eu lieu pour la première fois au Sénégal a permis après le 19 MARS 2000 l’avènement d’une alternance présidentielle au pouvoir.

La première alternance eut lieu avec l’accession au pouvoir des démocrates sous la houlette de Maître Abdoulaye Wade qui a longtemps vécu dans l’opposition. La deuxième alternance eut lieu avec l’arrivée de Macky Sall au pouvoir en 2012. Un deuxième président libéral après Wade, venait d’avoir la destinées des sénégalais entre ses mains. 

Rappelons que Macky Sall est devenu membre du Parti Démocratique Sénégalais (PDS) vers la fin des années 1980.  De Décembre 2000 à juillet 2001 il fut Directeur Général de la Société des Pétroles du Sénégal (PETROSEN) après plusieurs années au poste de chef de la division Banque de données et conseiller spécial auprès du Président de la République, chargé de l’Énergie et des Mines. De Mai 2001 à novembre 2002 il est nommé Ministre des Mines, de l’Énergie et de l’Hydraulique. De Novembre 2002 à août 2003 il deviendra Ministre d’État, Ministre des Mines, de l’Énergie et de l’Hydraulique dans le Gouvernement dirigé par Mame Madior Boye. D’Août 2003 à avril 2004 il sera Ministre d’État, Ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, porte-parole du Gouvernement d’Idrissa Seck

En Avril 2004 Macky sera Vice-président du comité directeur du PDS. 

Cet homme qui naquit un 11 décembre 1961 à Fatick, ville dont il fut maire de 2009 à 2012, a occupé sous l’escarcelle du PDS les fonctions de Premier Ministre de 2004 à 2007 et de Président de l’Assemblée Nationale sénégalaise de 2007 à 2008.

Marié à Marème Faye, ce père de de deux garçons et d’une fille sera élu quatrième président de la République du Sénégal et prendra fonction le 02 Avril 2012.  Macky est donc un vrai libéral qui se verra épaulé par deux anciens ennemis socialistes. Sous son aile protectrice, dandinent deux vieux socialistes qui ont accepté de se faire noyer par les eaux du « Macky » moyennant deux perchoirs stratégiques. Le premier occupe l’Assemblée Nationale du Sénégal avec un budget de 14 milliards. Le second, le Haut Conseil des Collectivités Territoriale avec la rondelette somme de 06 milliards comme budget.

Le Sénégal est certes une République de type monocaméral mais il n’en demeure pas moins un Etat où les droits humains sont fortement bafoués sous les regards hagards d’une part, d’une assemblée à majorité présidentielle dirigée par un allié socialiste ayant accepté de fondre son parti dans le « Macky » et d’autre part, d’un Haut Conseil des Collectivités Territoriales dirigé par le secrétaire général du Parti Socialiste.

En effet depuis qu’il est président de l’Assemblée Nationale, Monsieur Moustapha Niasse a refusé à son parti, l’Alliance des Forces pour le Progrès (A.F.P) de présenter un candidat aux élections au Sénégal.

C’est aussi le cas d’Ousmane Tanor Dieng qui a refusé que le Parti Socialiste ait un candidat aux prochaines élections présidentielles. 

Si ces deux doyens de la politique au Sénégal acceptent de se taire et de se caser derrière le Président Macky Sall c’est qu’ils occupent une place de premier choix dans la sphère d’influence qui pèse sur le chef suprême.  L’enjeu est donc de taille.

Ainsi donc, Macky semble être prisonnier de cet attelage bancal entre libéraux et socialistes, un dualisme qui porte de nombreux préjudices au peuple sénégalais.

Chacune des parties veut montrer urbi et orbi ses capacités, ses influences bref ses marques indélébiles dans le fonctionnement du régime. C’est ainsi qu’apparaissent dans le fonctionnement de l’Etat des pratiques bien libérales d’un côté,  et d’un autre celles bien socialistes. 

L’influence du grand libéral Maitre Wade sur Macky est palpable. Les mêmes pratiques sous Wade sont le lot quotidien des sénégalais. Des opposants en prison, le refus de reconnaitre les droits humains à un prisonnier, l’interdiction de marches où de manifestations, les lenteurs administratives dans le traitement des dossiers, le train de vie de l’Etat, l’augmentation du nombre de Ministres et de Ministres conseillers, le nombre exorbitant de chargés de missions, le manque d’humilité chez certains, la précipitation, la gabegie ( exemple : la réfection du building administrative qui coute plus de 35 milliards et la Sphère des Ministres ont une même utilité, l’argent du Building pouvait résoudre autre chose comme les abris provisoires). L’influence socialiste quant à elle apparait dans des pratiques comme l’octroi de bourses sociales aux démunis, la Couverture Maladie Universelle C.M.U (qui est une bonne politique mais mal suivie), la distribution de kilogrammes d’oignon, de pomme de terre et de pâte. Ce sont des pratiques bien socialistes qui nous rappellent les années 1990 et les files indiennes pour recevoir moins de 05 kilos de riz. 

En plus de cela, l’influence de la grande Dame avec sa fondation Servir le Sénégal semblerait préoccuper l’opposition. Mais le journaliste Souleymane Jules Diop n’avait-il pas raison de dire à haute et intelligible voix que : « Voter Macky c’est élire Marème » ?

Le parti au pouvoir semble incapable de voler de ses propres ailes. Au début le programme « yoonou yokouté » qui est un programme propre à l’APR et sur la base duquel le peuple a voté pour élire Macky, est vite mis de côté. Pourtant c’était le programme qui répondait mieux aux besoins des sénégalais. Le nouveau programme intitulé Programme Sénégal Emergent (P.S.E) est en grande partie en déphasage avec les aspirations du peuple.

Malgré les nombreux cris de cœur, malgré les avertissements d’un peuple épris de justice, malgré les dénonciations et les révélations faites par des journalistes d’investigations, malgré les nombreuses alertes de la société civile, le régime de Macky Sall semble rester sourd muet.

NDIOGOU FALL