Alla Kane : le doyen révolutionnaire de la nouvelle législature
À 87 ans, Alla Kane, figure emblématique du Parti africain de l’indépendance (PAI), préside la cérémonie solennelle d’élection du nouveau président de l’Assemblée nationale. Enseignant de formation, militant de la première heure, et père de neuf enfants, il est l’incarnation de l’engagement politique et syndical au service de son peuple. Retour sur le parcours hors du commun de ce monogame, fils du Baol.
Les Racines d’un fils du peuple
Originaire de Gatte, dans la région de Diourbel, Alla Kane revendique fièrement son héritage paysan. « Je suis et reste un fils du peuple, quand on sait qu’en 1936, les paysans constituaient plus de 90 % de la population de notre pays », affirme-t-il. Inscrit à l’école régionale de Diourbel en 1944, il embrasse une éducation qui l’amènera à découvrir les réalités de la domination coloniale et à se tourner vers les enjeux de libération nationale. Après son passage au Collège moderne de Thiès, il est admis à l’École des travaux publics de Bamako en 1954. Mais une maladie interrompt brutalement cette trajectoire.
Déterminé à poursuivre un autre chemin, il se tourne vers l’enseignement en 1955 et sert successivement à Goudiry, Saraya, Kidira, avant de revenir à Diourbel. C’est dans ce contexte qu’il développe sa conscience politique et amorce son engagement militant.
La flamme de la lutte révolutionnaire
Les années 1950 sont marquées par des événements mondiaux qui allument en lui une flamme révolutionnaire : la défaite de la France à Dien Bien Phu, le soulèvement armé en Algérie, et les batailles du Rassemblement démocratique africain. Adhérant au Syndicat unique de l’enseignement laïc (Suel), il gravit rapidement les échelons pour devenir responsable régional à Diourbel. En 1957, il rejoint le PAI, premier parti à exiger l’indépendance immédiate en Afrique de l’Ouest.
Alla Kane joue un rôle majeur dans l’organisation et la massification du parti à Diourbel. Il conduit la campagne pour le « NON » au référendum du 28 septembre 1958, diffusant largement l’idéal de libération nationale. Malgré la dissolution du PAI en 1960, il continue la lutte dans la clandestinité, assumant des responsabilités cruciales dans les batailles politiques et syndicales.
Un engagement à toute épreuve
En décembre 1961, Alla Kane est arrêté pour « activité politique troublante », symbolisant la répression contre les patriotes. Peu après, il participe à une formation militaire à Cuba avec 33 autres militants du PAI, revenant avec le grade de commandant de la zone Ouest du parti. Spécialiste de la stratégie de la guérilla urbaine, il renforce les bases du mouvement.
Cependant, son militantisme a un coût. Alla Kane est radié de la fonction publique et arrêté à deux reprises. Il attribue cette expérience difficile à son engagement pour le socialisme scientifique et le marxisme-léninisme, qui orientent sa vision politique et son militantisme.
De la lutte politique à la transmission du flambeau
Alla Kane poursuit son combat au sein de formations politiques comme « Yoonu Askan Wi » et des coalitions progressistes, jusqu’à fusionner avec Pastef en 2021. En tant que coordonnateur honoraire du mouvement « Maggi Pastef », il réunit les militants du troisième âge, témoignant de sa foi inébranlable en la mobilisation populaire.
Aujourd’hui, ce député octogénaire reste un modèle d’abnégation pour les jeunes générations. « La lutte pour la transformation réelle de la société est longue et difficile, mais elle est essentielle », rappelle-t-il, appelant à l’organisation, à la discipline et à un combat incessant pour libérer le pays des injustices.
Alla Kane, plus qu’un nom, est une histoire vivante : celle d’un patriote déterminé à rester au service de son peuple jusqu’à son dernier souffle.