Affaire Hiba Thiam : Les inculpés parlent sur PV
Confession à huis clos
Libération quotidien révèle dans son édition de ce jeudi 23 avril que la famille de feue Hiba Thiam est passée à l’acte en formalisant sa constitution de partie de civile. Elle a misé sur un redoutable procédurier : Me Seydou Diagne. L’instruction, pendante devant le juge du 8ème cabinet, devrait permettre de faire la lumière sur cette rocambolesque affaire dans laquelle aucun des inculpés ne dit la même chose.
C’est le seul homme de tenue du groupe. Ce vendredi 4 avril, en quittant son domicile, à Keur Massar, Lamine Diedhiou, policier en service au commissariat de Dakar, ne savait pas que sa vie allait basculer. A seulement 31 ans, il s’est tiré une balle dans la tête à cause de ses liaisons dangereuses avec Pape Diadia Tall, écroué en même temps que Djibril Ndiogou Basselle alias «Nekh », Dame Amar, Fatoumata Jacquelle Rigal dite «Poupette » et Alia Bakir pour association de malfaiteurs, non-assistance à personne en danger, détention, usage de drogue et violation de la loi sur le couvre-feu.
Lamine Diedhiou : «Ce que j’ai fait est illégal mais … ».
Si Lamine Diedhiou avait respecté son serment peut-être qu’Hiba Thiam serait encore aux côtés de sa famille. « J’étais à Keur Massar toute la journée du vendredi, jusqu’à 20 heures. J’ai reçu un appel téléphonique d’un certain Diadia que j’avais perdu de vue. Il m’a dit qu’il souhaitait que je l’aide parce qu’il voulait sortir alors qu’il y’avait le couvre-feu. Il ne cessait de m’appeler. Je suis ainsi allé le retrouver à Nord-Foire, précisément à «Youm Youm », et je l’ai escorté jusqu’à l’aéroport de Yoff. Diadia était à bord d’un véhicule aux vitres teintées. Nous avons dépassé deux check-points mais, à chaque fois, après présentation, ils nous laissaient passer. Je ne connais pas Hiba Thiam. Après les avoir escortés, Diadia a insisté pour me remettre 20000 Fcfa. Il disait que c’était pour le carburant ».
Une carrière qui s’effondre pour quelques miettes. «Ce que j’ai fait est illégal mais c’était juste dans le but d’aider Diadia car il me disait qu’il avait mal à la dent », confesse-t-il. «La fille décédée et Diadia sont arrivés au Garden sous escorte d’un scooter à bord duquel il y’avait un policier qui portait sa tenue et un gilet phosphorescent », confirmait plus tôt L.N., le gardien qui était de service à leur arrivée.
Louty Ba : « J’étais tétanisé… ».
Mais que s’est-il exactement passé lors de cette «house party » qui a viré à la tragédie ? Les versions divergent. Toutes s’accordent néanmoins sur un point : c’est Diadia Tall qui a alerté les gendarmes après avoir appelé les secours. «Je suis sorti de la chambre où je dormais pour tenter de réanimer Hiba, quand les autres ont dit qu’elle avait un malaise. Après plusieurs tentatives, j’ai constaté qu’elle n’avait plus de pouls. J’ai demandé aux autres d’appeler les secours car j’étais sous le choc. Diadia l’a fait. J’ai consommé de l’alcool mais pas de la drogue. J’étais tétanisé », racontera Louty Ba, qui a été placé sous contrôle judiciaire.
Dame Amar : «Je suis surpris par les propos de Louty Ba et de Diadia Tall ».
«Ma copine Alia m’a dit qu’elle ne se sentait pas bien et qu’elle voulait dormir. J’ai bu quelques verres avant de la rejoindre. Je me suis endormi. J’ai été réveillé par un bruit qui venait de l’intérieur de l’appartement. On est sorti et j’ai demandé ce qui se passait. Personne n’a répondu sauf Nekh qui m’a dit que ça n’allait pas bien avec Hiba. Il a rajouté qu’elle ne respirait plus. Je leur ai demandé de régler ça et j’ai quitté les lieux, avec ma copine, pour aller voir Amadou Niane (ndlr, placé sous contrôle judiciaire pour recel de malfaiteurs) », affirmera, le concernant, Dame Amar, qui s’est dit surpris par les propos de Diadia Tall et de Louty Ba selon lesquels il serait entré dans la chambre où était Hiba Thiam en plus de rejeter toute consommation de drogue lors de la soirée. «Je n’ai pas vu de la cocaïne au cours de la soirée », dira-t-il. Lorsque les enquêteurs l’interpellent sur les résidus de cocaïne trouvés dans son appartement, il persiste et signe : « Je ne sais pas. Si des traces de coke ont été retrouvées chez moi, ça ne vient pas de moi ». Une position qu’a confortée «Poupette » face aux enquêteurs : «Je ne connais pas Dame Amar comme étant un consommateur de drogue », jure-t-elle non sans indiquer qu’elle n’aurait jamais vu de cocaïne de sa vie.
«Nekh » : «Il y’avait un plateau rempli de cocaïne… »
«Nekh » sera plus précis : «Louty était effectivement entré dans la chambre pour essayer d’aider Hiba qui avait des problèmes pour respirer. Quand j’y suis retourné, il m’a lancé : «Oh Nekh, elle est morte ». Et, contrairement aux autres, il fera un aveu de taille aux gendarmes : «Il y’a avait un plateau rempli de cocaïne et nous nous sommes servis ».
Diadia Tall : « On a écouté de la musique, bu de l’alcool… ».
Ce que nie Diadia Tall : « On a écouté de la musique, bu de l’alcool, fumé des cigarettes et discuté entre nous. Je n’ai pas consommé de la drogue et je n’ai pas bravé la loi sur le couvre-feu car on était escorté par un policier ».
Alia Bakir : «Il y’avait de la poudre blanche… ».
Alia Bakir fait voler en pièces cette version : «Je suis venue au Sénégal pour voir Dame. J’occupe l’appartement depuis 10 jours. Je n’ai aucun rapport avec la victime, c’est la première fois que je rencontrais tous ceux qui étaient dans l’appartement à l’exception de Dame. Il y’avait de la poudre blanche mais je ne sais pas d’où elle venait. Je ne consomme pas de la drogue et je bois rarement ».
«Poupette » : «On aurait dit qu’Hiba souriait… ».
L’instruction pendante devant le juge du huitième cabinet va sans doute permettre de lever les zones d’ombre qui entourent cette rocambolesque affaire. En attendant, Hiba Thiam, est partie avec son éternel sourire comme le racontera «Poupette » aux enquêteurs : «Je dormais et c’est Diadia qui m’a informée de la situation. Je suis partie voir Hiba, elle était couchée sur le dos. On aurait dit qu’elle souriait. Je n’ai pas vu de traces de poudre blanche à côté d’elle… ».
La famille de la victime a commis Me Seydou Diagne.
La famille de la victime qui s’est officiellement constituée partie civile, en saisissant le juge du huitième cabinet, a porté son choix sur un redoutable procédurier : Me Seydou Diagne.