Campagne Tabaski, a-t-on raison de vouer le ministre aux gémonies ?
Suite à l’opération Tabaski 2019, des voix se lèvent avant l’heure pour critiquer la gestion du Ministre de l’Elevage et de la Production Animale (MEPA). Mais au regard du déroulement de la campagne, on peine à faire foi à ces sorties au vitriol dont les motivations restent sans fondement consistant : retour sur une campagne menée de façon inédite par un homme engagé dans la restructuration du secteur.
Le moment est encore prématuré pour tirer un bilan de l’opération Tabaski 2019 au niveau national, moins de 48h après la fête. Toutefois, la volée de bois verts soulevée par certaines critiques laisse pantois quant à ses motivations qui restent difficilement objectivables.
Plus que toute autre nomination à la tête du département, l’avènement de Monsieur Samba Ndiobène KA à la tête du Ministère de l’Elevage et de la Production Animale a suscité un immense espoir et de grandes attentes. En homme du sérail né et grandi à Boulal au cœur du Djolof, zone de prédilection de l’élevage au Sénégal, doublé d’un ingénieur agronome sorti de la prestigieuse ENSA (Ecole nationale Supérieure d’Agriculture), l’homme offre pertinemment le profil de l’emploi. Ses passages comme directeur général à la Direction du Matériel Agricole et de la SAED le gratifient d’une solide expérience. Cette trajectoire l’a dès l’entame de son magistère imposé comme un véritable acteur de terrain qui est allé au charbon pour éprouver lui-même la marche du secteur, donnant les grandes orientations et le rythme tout en se basant sur les feedbacks du terrain afin de donner plus d’efficacité et d’efficience à son action.
L’innovation majeure dans sa démarche ressort de la priorité qu’il compte donner à la production nationale en créant les conditions de son essor pour contrebalancer la dépendance vis-à-vis de la sous-région qui reste une réalité eu égard à la forte demande en période de Tabaski (15 à 20 milliards de contribution aux économies des pays pourvoyeurs).
En toute lucidité, le ministre a initié le changement de cap dans la douceur avec une certaine dose de continuité justifiant sa tournée sous régionale pour prendre langue avec les producteurs et favoriser l’entrée de moutons en provenance des pays limitrophes (Mauritanie, Mali…), gage de la prévention de toute pénurie en petits ruminants pendant cette période sensible de l’Aid EL Kébir. Cette démarche se fonde sur les bonnes pratiques en la matière de sa devancière, la ministre Aminata Mbengue Ndiaye.
Cependant, des craintes ont été alimentées par la précampagne de l’opération Tabaski 2019, fondées sur la pénurie de fourrage consécutive à l’hivernage précédent ainsi que l’installation tardive de la présente saison des pluies. Craintes qui ont été le soubassement de mesures volontaristes prises suite aux instructions du chef de l’Etat et qui ont été suivies à la lettre par le ministre Samba Ndiobène KA.
Ces mesures relatives à la suppression des taxes aux frontières sur les moutons, à la sécurisation des convois et des points de commercialisation, ont également porté sur l’alimentation de ces derniers en eau et en aliment de bétail à moindre coût. Le passage du sac d’aliment de 7400F à 5200F et le triplement de la quantité mise à la disposition des producteurs au niveau des foirails (30 tonnes contre 10 tonnes en 2018), ont conduit à la satisfaction déclarée des acteurs (dakaractu du vendredi 09 août 2019).
La tournée nationale ayant conduit le ministre dans tous les points de vente de Dakar et dans les plus réputés de l’intérieur du pays (croisement Ngoundiane, Touba Toul….) jusqu’à des heures tardives, a permis de prendre le pouls du bon déroulement de la campagne. Satisfecit des acteurs par rapport au respect des engagements de l’Etat, à la disponibilité du mouton à partir de 40000F et à l’accompagnement des autorités notamment la présence physique du ministre venu à l’écoute de leurs doléances pour une meilleure prise en charge de leurs préoccupations.
Ce dernier n’a également pas manqué de faire un plaidoyer pour l’engagement des jeunes et des femmes dans le secteur en respect d’un vœu cher au Président de la République. L’écho a été favorable auprès du Directoire National des Femmes Eleveurs du Sénégal (DIRFELS) qui, à travers sa directrice Adja Dieynaba SIDIBE a déclaré l’opération Tabaski 2019 satisfaisante.
Les critiques ne manqueront pas pour un pays non autosuffisant en moutons, les contingences conjoncturelles se feront jour chaque fois. Mais au-delà des mesures transitoires, la politique du MEPA, chevillée à des transformations structurelles mettant en avant la production locale devra être saluée et se poursuivre quels que soient par ailleurs les efforts de ses contempteurs. D’ailleurs, c’est le signe le plus éminent qu’une véritable révolution est en train de s’opérer dans le secteur.
Amadou DIOP, Inspecteur de l’Enseignement, Observateur de la vie publique.